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Un conte folklorique de Hiroshima

ENKOUSAN

Voici l’histoire de la rivière ENKOU, située au sud de la ville de Hiroshima.
Il était une fois, un grand-père, pécheur de son état, qui habitait avec sa femme au bord de la rivière ENKOU.
Ils étaient pauvres, mais heureux. Une nuit d' été, la grand-mère se réveilla et se rendit dans la cuisine pour boire. Quand elle regarda le grillage de la fenêtre, elle aperçut une longue main poilue qui la regardait. La main s'allongea et la grand-mère prit peur.
- Grand père, grand-père, lève-toi, dit la grand-mère.
- C'est la nuit, ne crie pas si fort, dit le grand-père.
- Il y a quelque chose de long et poilu qui me semble être une main qui me regarde. Qu'est-ce que cela peut bien être ? dit la grand-mère.
La main poilue de trois ou quatre doigts était fine comme une bardane, elle était mouillée, et brillait. C'était certain, la main bougeait.
Elle était un peu différente de celle d'un humain.
Le grand-père se souvint du ENKOU (être imaginaire habitant les eaux, appelé aussi KAPPA)
On dit qu' un ENKOU habite dans cette rivière depuis longtemps.
Selon la tradition, quand le ENKOU a faim, il mange le foie des humains.
- C'est sans doute la main du ENKOU. Il est peut-être venu pour manger notre foie.
Grand-père, que devons-nous faire?
Le grand-père regarda la main du ENKOU qui s'allongea peu à peu sous la lumière de la lune.
- Garde ton sang-froid. Observe sans parler. Et nous verrons ce que c'est.
Le ENKOU ne pensait pas qu'il était surveillé par le grand père et la grand-mère, il allongea sa main, la fit glisser sur l'évier, attrapa le reste de la sardine et retira sa main.
Le grand-père et la grand-mère, effrayés, ne purent pas pu dormir.
Le lendemain matin ils clouèrent des bambous pour boucher les interstices du grillage de la fenêtre.
Mais cela ne fut pas efficace, car ce soir-là, la main du ENKOU apparut de nouveau.
- Grand père, si on donnait les entrailles de la sardine au ENKOU. Je pense qu’il serait content et que nous pourrions mieux dormir, dit la grand-mère.
- C'est une bonne idée. Nous ne mangeons pas les entrailles de la sardine. Et nous n'avons pas d'enfant. On va considérer le ENKOU comme notre enfant dit le grand-père.
- Mais oui. On va faire comme si c'était notre enfant. C'est, une excellente idée répondit, la grand-mère.
Ils disposèrent les entrailles de la sardine sur l'évier et ils se couchèrent. Le lendemain matin les entrailles de la sardine avaient disparu.
Le grand-père et la grand-mère firent de même tous les soirs avant de se coucher.
Cet été-là, aucun enfant ne mourut noyé dans la rivière d'ENKOU.
Les années passèrent et le grand-père et la grand-mère se mirent à attendre avec impatience l'arrivée de l'été. Ils étaient tristes s’ils ne voyaient pas la main poilue.
Quand l'automne arrivait, ils pensaient déjà a l'été suivant. Quand ils parlaient du ENKOU, ils étaient joyeux et un voisin dit même que le grand-père et la grand-mère rajeunissaient. Les poissons qu'ils vendaient étaient très frais, se conservaient longtemps et se vendaient à bon prix.
En hiver, le grand-père arrivait même à pêcher des poissons introuvables en cette saison. Le grand-père fut considéré comme le maitre incontesté de la pêche, et on se disait même qu'il pouvait parler avec les poissons. Grâce à cela, leur vie devint plus facile.
Les années passèrent, le grand-père et la grand-mère, à plus de quatre-vingts ans, étaient en bonne forme. Comme l'évier et le grillage étaient en bois, ils commencèrent à devenir vieux et des épines en sortaient.
- C'est dangereux, le ENKOU pourrait se blesser. Si on mettait du cuivre jaune autour de l’évier pour empêcher le bois de pourrir, suggéra la grand-mère.
- C'est une bonne idée. Le bois va durer longtemps.
L'évier devint ainsi tout propre. Ils disposèrent comme d'habitude les entrailles de la sardine et attendirent le ENKOU toute la nuit, mais il ne vint pas. Au petit jour, le soleil se leva dans le ciel. L'évier tout propre brillait sous le soleil.
Les entrailles de la sardine étaient toujours là. Le lendemain et le surlendemain il en fut de même. Sans doute le ENKOU savait-il que les choses qui brillent sont dangereuses.

Fin

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